On a souvent soutenu que la lutte
contre le terrorisme ne peut être gagnée. La bataille contre l'idéologie islamiste, elle, ne peut assurément pas l'être. Mais je continue de soutenir le contraire : le terrorisme peut
être vaincu. Tout en gardant à l'esprit qu'il y a une condition avec laquelle il a des chances de l'emporter. Mais même dans ce cas la
terreur est toujours une victoire à la Pyrrhus, une victoire détruisant tout autour.
Qui souffre en premier des
attentats ? Des études sérieuses impulsées par l’école de
Chicago arrivent à la même conclusion : les personnes
utilisant chaque jour les transports en commun sont les plus
susceptibles d'en être affecté. Le 13 novembre la jeunesse, pour
une grande part, sortie prendre un verre, écouter de la musique en
fut la victime. Il paraît évident, pour prendre cet exemple, que
posséder une résidence secondaire à la campagne prémunit contre
des attaques perpétrées généralement en grandes agglomérations.
Historiquement ensuite, aucun
mouvement terroriste n'a infléchi de manière profonde le cours des
événements. Depuis le Moyen Âge pour le moins. Les anarchistes,
les sectes en tous genres ont toujours effrayé pour disparaître
dans une condamnation totale par l'opinion publique. Encore une fois,
cela n'enlève rien à la désolation que la terreur répand auprès
des victimes et proches. Mais la méga-attaque du 11 septembre, elle-même, n'a
pas provoqué l'effondrement de la bourse et de l'économie
américaine. Et mondiale.
L'opinion comme quoi il est
impossible de vaincre le terrorisme me fait penser aux royaumes
nord-africains. Les Barbaresques sillonnaient la mer Méditerrannée à
la recherche de navires à saisir. Ils sont allé aussi loin que les
côtes irlandaises. En cas de capture la cargaison était pillée et
l'équipage était soit vendu comme esclave soit rachetée par les
Européens. Ainsi prit naissance une pratique de rançon. Elle fut
acceptée par tout le monde. Les commerçants avaient tous intégré
le risque de la rançon dans leurs calculs, avant le départ en mer.
Les Barbaresques formaient ainsi des véritables régimes assimilés
à des kleptocraties jusqu’à la fin du 19ème siècle. Ces
pratiques ayant duré plusieurs siècles, étaient considérées
comme immuables. Pourtant elles furent arrêtées par l'imposition
d'un droit naissant international.
Il est possible de soutenir que le
terrorisme gagne à une seule condition : que les pratiques
soient acceptées par les victimes et par les bourreaux.
Éventuellement les premiers espérant prendre leur revanche.
Pourtant le terrorisme provoque plus de dégâts quand ses vues
sont acceptées par une minorité. Ou excusées pernicieusement.
Charlie Hebdo avec les « oui, mais ils l'ont cherché... »
ont contribué à faire le lit du 13 novembre. Notre aveuglement fut
total. Comme fut l'effet surprise de ce deuxième hyperattentat
réussi en l'espace de seulement onze mois.
Il faut rester optimiste et agir.
Résilient aussi. Par sa cruauté intrinsèque mais aussi par
l'impossibilité où il se trouve de gagner l'opinion publique, le
terrorisme ne peut pas gagner. Le fait que le 11 septembre américain
ne s'est pas reproduit en est encore une preuve. Mais paradoxalement
cela doit nous pousser à plus d'action car il se nourrit de notre
inattention. Eh oui, parfois de notre insouciance, dont on reproche
tant aux Français. Que les terroristes ne changent rien c'est aussi un
leurre : car des deux côtés de l'Atlantique, dans le monde
entier, une certaine innocence est perdue. Nécessairement.
Une chose est certaine : ce que
les terroristes voient comme hautement valeureux n'est en réalité
que le retour à une animalité que, depuis longtemps, l'être humain
refuse. Et cela devrait aussi nous faire espérer que ces vestiges
d'un monde ultraviolent, disparaîtront par une coalition planétaire.